La malnutrition au Sénégal

 

Visite d’un Foyer d’Animations et de Récupération Nutritionnelle des Enfants à Dakar

 

Selon le type de malnutrition, la prise en charge se fait au sein d’un FARNE (Foyer d’Animations et de Récupération Nutritionnelle des Enfants) ou d’un centre de santé.

 

Qu’est-ce qu’un FARNE ?

 

A Dakar, ils sont au nombre de deux, situés dans le quartier de Ouakam : Touba Ouakam et Cité Avion.

Dirigés par la Cellule de Lutte contre la Malnutrition (CLM) d’Enda, on retrouve au sein de chaque FARNE un point relais géré par des femmes originaires du quartier en question.

Les femmes-relais ont été formées par les superviseurs, sage-femmes et infirmiers chef de poste de la CLM.

Après deux sessions de formation sur l’hygiène, l’alimentation de l’enfant de 6 à 59 mois et la prise en charge en cas de malnutrition, elles sont autonomes et aptes à dépister les enfants malnutris au sein du FARNE.

Au cours des animations elles relayent les informations sur l’alimentation et l’hygiène alimentaire auprès des mères ou gardiennes.

Elles effectuent également le suivi mensuel des enfants dépistés par des visites à domicile.

Chaque enfant bénéficie d’un suivi mensuel où les données sont recueillies sur une fiche personnelle avec la courbe du statut nutritionnel, l’indicateur poids/âge et le périmètre brachial.

Au niveau des sites se réalise :

– une pesée mensuelle

– un suivi de croissance

– une démonstration culinaire (réalisation de recettes enrichies)

– une distribution de moustiquaires imprégnées

Chaque site gère une zone où les femmes enceintes, allaitantes ou ayant des enfants de moins de 5 ans peuvent assister aux « causeries » éducatives.

Cette étape est importante car les bénéficiaires (femmes enceintes et mères) sont le plus souvent analphabètes et dans l’ignorance totale des règles de sécurité sanitaire (hygiène des biberons) et d’alimentation infantile.

Les biberons peuvent être utilisés non lavés pendant 3, 4 voire 5 jours… un nid douillet pour les bactéries avec une prolifération rapide étant donné une température ambiante pouvant avoisinée 40°.

Suite au dépistage peuvent avoir lieu des entretiens individuels avec les mères dont les enfants ont une perte de poids constatée. Les dysfonctionnements sont transmis aux superviseurs et les causes analysées avec la mère.

Il existe deux types de malnutrition aigüe : la modérée et la sévère.

Les symptômes cliniques sont différents en fonction du degré de malnutrition et leurs traitements, spécifiques.

Les enfants dépistés en malnutrition aigüe modérée (MAM) sont pris en charge dans les foyers puis des visites à domicile sont programmées tous les 15 jours pour s’assurer du bon suivi des conseils par les mères ou gardiennes.

Lorsque l’enfant dépisté se trouve en situation de malnutrition aigüe sévère (MAS) il est alors envoyé dans un district de santé (médecin, infirmier et sage-femme) qui le prendra en charge pour une renutrition à base de Plumpy’Nut.

 

Le FARNE de Touba OUAKAM

 

Réouverture du FARNE de Touba OUAKAM le 3 décembre 2013, après trois mois de non-activité.

Mariétou, sage-femme et superviseur du site, assiste systématiquement à la réouverture de chaque FARNE. Leurs fonctionnements demandent une organisation et un dispositif bien particulier, qui après les périodes d’inactivité ont besoin d’être remémoré.

Le foyer de Touba Ouakam avait fermé il y a de ça quelques années, pensant que la malnutrition avait été stoppée dans ce district. Malheureusement, force a été de constater une importante recrudescence d’enfants malnutris et sa réouverture a été nécessaire il y a 2 ans.

Le foyer accueille des enfants de 6 à 59 mois, pendant une période de 18 jours tous les 3 mois,.

En priorité il garde un rôle de prévention avec l’instruction des mères (alimentation de leur enfant, hygiène, vaccination et précautions à prendre contre le paludisme).

Sensibiliser les mères à la santé de leur enfant est essentiel car malheureusement elle n’est pas toujours une priorité.

Mariétou racontait, pour la petite anecdote, qu’une mère donnait à son enfant de deux mois du Thiep (plat typique sénégalais à base de riz et poisson)…

Encore trop fréquemment, le foyer perd son rôle préventif et est utilisé à des fins thérapeutiques pour des prises en charge d’enfants en situation de malnutrition aigüe modérée.

 

Déroulement du FARNE

 

Durant ce premier jour, les femmes relais effectuent le dépistage des enfants du quartier : pesée, calcul de l’indice taille/poids ou poids/âge et mesure du périmètre brachial.

En amont, elles ont identifié les mères ou gardiennes du district avec des enfants en bas âge, sont allées les voir pour les inciter à participer aux animations et séances de dépistage. Elles mettent en avant toute l’attention et la vigilance particulière dont les mères doivent faire preuve vis-à-vis de leurs enfants face au risque omniprésent de malnutrition.

Dans un second temps, elles ont expliqué aux bénéficiaires présentes la préparation d’une poudre enrichie : le LHS.

Mélange composé de lait en poudre entier, d’huile et de sucre.

La recette :

– 6 doses de lait entier en poudre

– 2 doses de sucre

– 1 dose d’huile d’arachide.

Mariétou a proposé un moyen mnémotechnique pour retenir le dosage (621). Elle a fait participer les bénéficiaires en leur posant régulièrement des questions, meilleur moyen de voir si elles ont compris et retenu les conseils prodigués.

Le mélange donne une poudre, comme la poudre de lait, avec des propriétés de conservation intéressantes, mais surtout il est plus économique !

Dans ce quartier, les familles sont défavorisées et le lait en poudre enrichi pour nourrissons, en remplacement du lait maternel, coûte cher (3500 Fcfa/boîte soit environ 5 €).

Le LHS se dilue avec de l’eau et complète voire se substitue aux repas de l’enfant, jusqu’à une reprise de poids correcte.

Les femmes-relais ont expliqué sa préparation et son utilité à l’aide de dessins, ce qui a rendu l’animation plus attractive et les bénéficiaires ont plus participé.

La “posologie” du LHS est de 1 à 2x/jour, sous forme de biberon.

Cependant, il peut être conseillé de le donner en fonction des besoins de l’enfant.

Pour un enfant sous-nutris, le ratio LHS/eau = 1 dose de LHS pour 4 doses d’eau.

Si l’enfant présente des diarrhées (très fréquent avec le manque d’hygiène et de salubrité de l’eau), le ratio LHS/eau = 1 dose de LHS pour 7 doses d’eau.

Lorsque des enfants malnutris sont confiés au FARNE, les femmes-relais conçoivent une renutrition à partir de ce LHS mais aussi avec l’aide de préparations culinaires enrichies telles que :

– le “Thioura Guenté”, plat à base de riz, poudre d’arachide, beurre (ou huile d’arachide), lait entier, sucre

– le “Makhale” contenant du poulet haché, riz, huile d’arachide (ou avec du poisson)

– la bouillie réalisée avec du mil, jaune d’oeuf, huile d’arachide, sucre et sel (ou avec pâte d’arachide)

 

 

Démonstration culinaire

 

Au cours de cette session, une préparation culinaire devait être confectionnée. La ponctualité et l’assiduité des mères n’étant pas toujours de rigueur, le temps imparti n’a pas suffi.

Les femmes relais avaient anticipé la situation et déjà préparé au préalable le plat prévu pour l’animation, ce jour-là le Thioura Guenté.

Joli moment de partage entre les mères et leurs enfants qui dégustent ensemble la préparation. Servi chaud, il est sucré et “bourratif”, il rappelle légèrement le riz au lait.

Ce plat, très nutritif, permet d’apporter suffisamment de calories pour un enfant dénutri.

Enda lutte contre la pauvreté et souhaite mettre en avant les produits de l’agriculture locale, pour permettre la réduction des coûts (pas d’importation) et la valorisation de l’agriculture du pays par l’utilisation de ses matières premières, comme l’arachide, le mil ou encore le poisson.

Les problèmes de culture et de religion ont un impact considérables sur les problèmes de malnutrition du fait, non seulement du refus d’utilisation de certains aliments dans l’alimentation infantile mais également de la position des mères face à l’allaitement.

Les femmes musulmanes ne peuvent allaiter et se font « prescrire » un produit par les marabouts pour stopper la lactation. Néanmoins, un allaitement dans les 6 heures suivants l’accouchement est fortement conseillé afin de développer le système immunitaire du nouveau-né et lui apporter les nutriments essentiels à sa croissance.

Le lait maternel assure les besoins du nourrisson, jusqu’à la diversification alimentaire, qui est quasi-inexistante dans leur culture.

Moment intense et émotionnellement fort, passé avec ces femmes et ces enfants. Le constat de la difficulté à combattre ce mal disséminant, malgré les moyens mis en oeuvre par Enda est indéniable.

Le personnel de la CLM fournit, depuis 2003, un travail conséquent et il en reste encore énormément à accomplir notamment sur le plan de l’éducation des mères.

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